Des milliers de morts et une remise en cause quotidienne de la place du nucléaire dans le monde : tel est le bilan que tirent les médias de la catastrophe qui s’abat sur le Japon depuis vendredi 11 mars 2011. Et si le nucléaire disparaissait, la Bourgogne serait-elle prête à faire face à ce défi énergétique ? Pour répondre à cette question, dijOnscOpe a fait le tour des réalisations et des projets liés aux énergies renouvelables dans la région, entre géothermie, photovoltaïque, éolien ou encore bois énergie… Conclusion : cette dernière ressource pourrait bien sauver la Bourgogne !
- L’éolien : 72 mégawatts (MW) contre 1.000 escomptés
Lentement mais sûrement… L’énergie éolienne fait son nid en Bourgogne, forte d’un gisement de vent offrant un potentiel compris entre 1.600 et 1.800 MW – soit l’approvisionnement de 1,6 à 1,8 million de foyers (Lire document joint). Ce dernier est particulièrement important dans le Nord de l’Yonne, sur les collines du Sénonais, et d’autres zones présentent un bon potentiel comme l’Auxerrois, le massif du Morvan, le plateau de Langres ou encore les reliefs des Hautes-Côtes en Côte-d’Or… En théorie, il faudrait atteindre 1.000 MW pour entrer dans les objectifs européens de « 20% d’énergies renouvelables par territoire en 2020 » et satisfaire ainsi les besoins de la moitié des Bourguignons. Dans les faits, le compte est loin d’être bon.
Les deux réalisation de la région ont en effet une puissance maximale de 72 MW au total… A Saint-Seine-l’Abbaye, en Côte-d’Or, les 25 éoliennes – 50 MW en tout – couvrent les besoins annuels d’environ 48.000 personnes, tandis qu’à Beurey-Bauguay, deuxième parc de Bourgogne, les six éoliennes peuvent fournir en continu 12 MW à la population.
Si la Bourgogne devait se passer de nucléaire dès demain, l’éolien ne ferait donc pas de miracles pour les 1.638.588 habitants de la région… Et pour 2020 ? Les projets font leur chemin. 82 nouvelles implantations d’éoliennes ont déjà reçu leur permis de construire pour une puissance de 178 MW et de nouvelles pistes sont en cours d’étude aujourd’hui, pour 350 MW supplémentaires. La Bourgogne peut donc s’attendre à voir éclore dans la décennie les projets « Compagnie du Vent » – 23 éoliennes réparties sur les communes d’Etalante, Poiseul-la-Grange et Echalot -, « Pays de St-Seine » – 25 éoliennes divisées entre Bligny-le-Sec, Villotte-Saint-Seine, Turcey et Saint-Martin-du-Mont – ou encore la centrale éolienne « De la Montagne » du côté de Grosbois-en-Montagne, en Côte-d’Or…
- L’énergie solaire : 15 MW… et des coups de frein
Les années 2000 auront vu l’essor du photovoltaïque en Bourgogne, les années 2010 connaîtront peut-être son déclin… Au 30 septembre 2010, 2.763 installations représentant 15 MW de puissance étaient raccordées au réseau d’électricité dans la région mais, d’une part, les projets ne bénéficient plus de l’aide du conseil régional ni du Fonds européen de développement régional (Feder) depuis mai 2010 ; d’autre part, le gouvernement a baissé de 20% les tarifs de rachat de l’électricité par EDF pour les projets mis en place après le 02 décembre 2010, ce qui a pour conséquence de revoir à la baisse les intentions d’investissement en la matière (Lire ici notre article et ici LExpress.fr).
Et les 1.000 MW générés chaque année par les panneaux photovoltaïques du futur dépôt de tramway dijonnais ? S’ils permettraient de compenser en totalité les besoins en énergie électrique du centre de maintenance, de produire un surplus d’électricité réinjecté dans le réseau EDF et d’éviter le rejet d’environ cent tonnes de CO2 par an, son avenir est compromis… « Le projet d’équipement en panneaux photovoltaïques du futur dépôt du tramway est aujourd’hui remis en cause par la publication d’un nouveau cadre règlementaire organisant la filière photovoltaïque en France », remarquait François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon et président du Grand Dijon, lors de la soudure du premier rail de tramway, vendredi 11 mars 2011 (Lire ici notre article).
Seule lueur d’espoir pour une relance de ce secteur en Bourgogne : le projet de centrale photovoltaïque de Semur-en-Auxois (Lire ici Semur Magazine). D’une capacité comprise entre trois et cinq mégawatts, ses douze hectares de panneaux couvriront largement les besoins de la population de la commune dès 2012… Mais là encore, la filière bourguignonne est loin du compte en cas de disparition du nucléaire !
- La filière « bois énergie » : déjà 7% de la consommation énergétique régionale !
« La forêt occupe un tiers du territoire de la Bourgogne : le bois a donc toujours été exploité comme source d’énergie même si un recul significatif de 50% a été constaté pour le chauffage domestique dans les années 1990 au profit des énergies fossiles, moins chères et plus faciles à utiliser », remarque l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Aujourd’hui, le bois énergie représente environ 7% de la consommation énergétique régionale et on dénombre 240 chaufferies collectives ou industrielles opérationnelles pour une puissance de 270 MW en janvier 2011…
Et si l’avenir énergétique de la Bourgogne passait par le bois ? Avec 200 MW de plus que l’éolien en fonctionnement aujourd’hui, le potentiel du bois énergie pourrait même être doublé selon l’Ademe : « Plus d’un million de mètres cubes supplémentaires – à dominante feuillus – pourraient être mobilisés chaque année, à condition d’investir dans la desserte forestière et de promouvoir les coupes d’amélioration pour garantir une gestion durable des forêts. Cette mobilisation supplémentaire permettrait un doublement de la consommation régionale de bois énergie ». Et les projets ne manquent pas… Sur la période 2007-2013, l’Ademe compte contribuer à la réalisation de 200 nouvelles chaufferies bois industrielles et collectives.
L’avantage du procédé ? L’approvisionnement est moins coûteux que le fioul et repose sur des circuits économiques locaux. L’inconvénient ? L’investissement initial, soit environ 150.000 euros pour une chaufferie, qui pèse lourd dans un budget de petite commune…
- Le biogaz au stade des micro-projets
Le biogaz est un gaz naturel provenant des effluents d’élevage ou des déchets ménagers. Produit à partir d’un processus de fermentation – ou méthanisation – il peut ensuite être utilisé comme combustible afin de produire de la chaleur et de l’électricité. Actuellement, seule une installation de méthanisation en industrie agro-alimentaire fonctionne en Bourgogne : il s’agit de la fromagerie Gaugry à Brochon, en Côte-d’Or, qui méthanise le petit lait. Le biogaz produit sert ensuite à chauffer ses locaux. Le premier projet de méthanisation dans le monde agricole est en cours de construction au Gaec des Plots situé à Devay, dans la Nièvre. La méthanisation des déjections d’élevage et des déchets agro-alimentaires produira l’électricité et la chaleur nécessaires pour chauffer une douzaine de maisons via un réseau de chaleur de 800 mètres. Sa mise en service est prévue pour le deuxième semestre 2011.
En ce qui concerne la valorisation des déchets ménagers, trois centres fonctionnent déjà en Bourgogne. A Saint-Florentin et Saint-Fargeau, dans l’Yonne, le biogaz permet de produire de la chaleur afin de traiter les jus de décharge. Le centre de Chagny, en Saône-et-Loire, tire du biogaz de la chaleur comme de l’électricité. Loin d’être une solution-miracle, le biogaz est toutefois une alternative qui pourrait alimenter en énergie de nombreuses exploitations bourguignonnes…
- La géothermie : un faible potentiel en Bourgogne
Le micro-hydraulique étant encore embryonnaire en Bourgogne, nous terminerons ce tour d’horizon par la géothermie – ou prélèvement de la chaleur contenue dans le sol. Elle se décline en trois catégories : la géothermie très basse énergie (température inférieure à 30°C) ayant recours aux pompes à chaleur ; la géothermie basse énergie (température entre 30 et 90°C) ; et la géothermie haute énergie (température supérieure à 150°C).
« En Bourgogne, il n’y a pas de potentiel géothermique haute énergie. Le potentiel basse énergie se résume à la source chaude de Bourbon-Lancy, en Saône-et-Loire, utilisée à des fins thermales et dont la température est de 56°C. Enfin, le potentiel en géothermie très basse énergie est assez faible concernant les nappes et plus important concernant la chaleur du sol », résume l’Ademe. A ce titre, la construction de dix pavillons locatifs chauffés par pompes à chaleur à Sennecé-lès-Macon, en Saône-et-Loire, pourrait servir d’exemple pour de futurs projets…
En conclusion, le nombre et la nature des projets de développement des énergies alternatives en Bourgogne ne permettent pas, aujourd’hui, de pallier une éventuelle disparition du nucléaire. Cependant, le potentiel de la filière bois et de l’éolien dans la région pourraient contribuer, d’ici 2020, à réduire le lien de dépendance à cette énergie…
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