Le feuilleton des cantonales 2011 continue au coeur de la côte viticole ! Pour le dixième épisode de son tour de Côte-d’Or en prévision de cette échéance électorale, en mars 2011, dijOnscOpe porte son regard sur les terres de Gevrey-Chambertin, où les candidats en lice – Francis Fabin (Front national), Eugène Krempp (Europe écologie-Les Verts et Cap 21), Eric Michon (Front de gauche), Hubert Poullot (Initiatives Côte-d’Or) et Jean-Claude Robert (Forces de progrès) – se sont prêtés au jeu des questions-réponses…
- Portrait-robot du canton
Le canton de Gevrey-Chambertin compte 15.176 habitants selon l’Insee. Les trente communes qui le composent son Barges, Bévy, Brochon, Broindon, Chamboeuf, Chambolle-Musigny, Chevannes, Clémencey, Collonges-lès-Bévy, Corcelles-lès-Cîteaux, Couchey, Curley, Curtil-Vergy, Détain-et-Bruant, Epernay-sous-Gevrey, L’Etang-Vergy, Fénay, Fixin, Gevrey-Chambertin, Messanges, Morey-saint-Denis, Noiron-sous-Gevrey, Quemigny-Poisot, Reulle-Vergy, Saint-Philibert, Saulon-la-Chapelle, Saulon-la-Rue, Savouges, Segrois, Semezanges, Ternant et Urcy. Il compte 5% de chômeurs contre 8,8% en Côte-d’Or et 20,1% de retraités contre 21,1% en Côte-d’Or.
- Cinq candidats
– Liste Front National : Francis Fabin, ouvrier viticole.
– Liste Europe Écologie/Les Verts/CAP21 : Eugène Krempp.
– PCF 21 (Liste Front de gauche) : Eric Michon, 49 ans, archéologue.
– UMP (Liste Initiatives Côte-d’Or) : Hubert Poullot, 55 ans, maire de Saint-Philibert et président de la communauté de communes du Sud dijonnais.
– Parti socialiste (Liste Forces de progrès) : Jean-Claude Robert, 63 ans, inspecteur du Trésor public, maire de Gevrey-Chambertin et président de la communauté de communes de Gevrey-Chambertin.
→ Le conseiller général actuel du canton est Jean-Claude Robert, 63 ans, inspecteur du Trésor public, maire de Gevrey-Chambertin et président de la communauté de communes de Gevrey-Chambertin.
- Le canton en cinq questions…
1 – La gare de triage de Gevrey-Chambertin est aujourd’hui en plein bouleversement : 120 emplois sont directement menacés par la réforme nationale du fret (Lire ici notre article). Le conseil général peut-il avoir un rôle dans la sauvegarde de cet outil qui répond aujourd’hui à 20% des besoins de tri français ?
– Francis Fabin (Front national) : « La réforme nationale du fret… Un propriétaire de péniche un jour m’a parlé de verre à recycler qui part en camion chez St-Gobain à Lyon alors qu’il n’y avait rien d’urgent et que lui cherchait ce genre de fret. Il y a, pour chaque produit, une notion de coût au kilomètre à la tonne transportée. À qui profite cette réforme ? On construit des lignes pour des trains rapides ; ça devait faire de la place pour des trains de marchandises – à faible valeur ajoutée – roulant de nuit. J’espère seulement que les élus en place ont les éléments du dossier, comme pour tous les sujets ; c’est pour ça d’ailleurs que nous voulons être élus ».
– Eugène Krempp (EELV-Cap 21) : « Le conseil général peut avoir un rôle à jouer : il serait nécessaire de mettre en place un partenariat Etat-Région-Département-SNCF pour définir la faisabilité et l’anticipation des besoins du fret ; celui-ci aura toute sa place dans les années futures compte tenu des enjeux énergétiques et notamment la vitesse de l’augmentation du coût des carburants. De réelles possibilités existent, a priori d’autres partenaires allemands seraient possible… ! Le fret ferroviaire, c’est économiquement et écologiquement souhaitable ! »
– Eric Michon (Front de gauche) : « Le triage de Gevrey est en effet vital pour l’emploi, car non seulement 120 emplois sont menacés mais cela implique également de nombreux autres emplois indirects sur le canton et dans toute la Côte d’Or. La destruction de cet outil performant aurait également des conséquences au niveau de l’environnement car l’abandon programmé de l’activité fret sur le traitement des wagons isolés lanceraient des centaines de milliers de camions supplémentaires sur les routes. Cette décision, si elle était appliquée serait un contre-sens pour l’environnement et la sécurité routière. Les élus et la population doivent faire pression sur la direction de la SNCF pour qu’elle change de stratégie. Le gouvernement tient des propos sur l’environnement dans les instances internationales et fait le contraire dans notre pays ».
– Hubert Poullot (Initaitives Côte-d’Or) : « En octobre 2010, le conseil général a demandé à la direction de la SNCF de maintenir une activité fret sur le triage de Gevrey pour des raisons évidentes sur l’emploi et l’environnement. Aujourd’hui, malheureusement, avec la crise économique et la baisse d’activité en général, une réorganisation est nécessaire. Mais nous devons conserver l’activité du triage de Gevrey pour des raisons essentielles de services car si demain, nous voulons diminuer le nombre de transports par route, il faudra faire face à ce nouveau trafic par rail. Je fais partie des personnes qui demandent à l’Etat d’imposer aux industriels que tous les transports de marchandises de gros volumes, non urgents et sur longue distance comme les engrais, l’eau minérale, l’automobile, le soient impérativement par rail. Je soutiens les agents de la SNCF pour le maintien de cette activité qui est plus que nécessaire sur l’ensemble du territoire départemental voire national ».
– Jean-Claude Robert (Forces de progrès) : « L’assemblée départementale s’est prononcée à mon initiative à la session de novembre et le voeu a été adopté à l’unanimité des conseillers généraux pour dénoncer le plan fret national et demander qu’il n’y ait aucune suppression de poste. L’action du Département passe plus par les autres infrastructures de transports et notamment la route. Si la suppression du fret a pour conséquence de mettre des dizaines, voire des centaines, de camions de plus sur les routes, celles-ci seront plus rapidement abimées… Nous avons donc un intérêt très concret à ne pas abandonner le fret et soutenir son développement. Maintenant je regrette que le président du conseil général ne se soit pas beaucoup mobilisé sur ce sujet, comme sur d’autres d’ailleurs ».
2 – L’État a imposé une baisse de rendements aux vignerons des Hautes-Côtes. Aujourd’hui, les producteurs bourguignons de crémant ont besoin d’importants volumes de raisin provenant de cette zone. Pourtant, l’offre ne peut plus répondre totalement à la demande… Que peut faire le conseil général pour améliorer la situation ? Quelles actions mèneriez-vous pour redynamiser cette zone économique ?
– Francis Fabin (Front national) : « S’il y a une demande en raisins pour faire du crémant, c’est à la corporation des producteurs de s’organiser et de s’entendre avec leurs fournisseurs et négociants. Le département a assez des 180 millions d’euros (soit 180.000 Smic) plus les frais financiers. S’ils veulent aider, il y a les murettes et les murgers à rationaliser ».
– Eugène Krempp (EELV-Cap 21) : « Je ne crois pas à l’efficacité d’une économie orchestrée par des décisions centralisées ; une économie efficace, c’est le résultat d’un partenariat à l’intérieur des filières de production et aval dans l’éthique de l’intérêt général. »
– Eric Michon (Front de gauche) : « En Côte-d’Or, nous assistons à un « recentrage » des grandes entreprises viticoles qui vont jusqu’à investir en Amérique ou en Afrique du Sud, alimentant ainsi leur propre concurrence au détriment des petits producteurs qui sont menacés. Il faut aider l’agriculture à se diversifier et promouvoir l’agriculture de qualité, notamment biologique ou raisonnée, et les circuits courts de distribution.
La filière viticole n’est pas la seule qui doit être protégée. Il y a aussi toutes les autres filières de l’agriculture et la filière bois qui doit retenir notre attention, là aussi dans un souci de raccourcir les circuits de distribution. Les agriculteurs doivent pouvoir vivre de leur production et de leur travail. L’exemple de crèches scolaires approvisionnées en produits locaux doit être développé ».
– Hubert Poullot (Initaitives Côte-d’Or) : « Cette modification des règles liées au rendement viticole provient des professionnels viticoles des autres régions de France. Aujourd’hui, ces limites de rendement sont liées en fonction du type de cépage. Si certaines exploitations se trouvent en difficulté, le conseil général devra venir en aide pour la mise en place de nouvelles plantations ».
– Jean-Claude Robert (Forces de progrès) : « La diminution des rendements mise en place par les pouvoirs publics et la profession est un gage de qualité. Je ne pense pas qu’il faille revenir là-dessus. Il existe encore d’importantes surfaces non-plantées. Encore faudrait-il que le prix d’achat des raisins soit suffisamment rémunérateur et attractif. Enfin je pense qu’il faut absolument protéger l’appellation « bourgogne », notamment l’appellation « bourgogne blanc » et refuser que celle-ci soit délocalisée dans le Beaujolais ».
3 – Le conseil général ne s’est toujours pas engagé publiquement au sujet du classement des climats de la côte viticole au patrimoine mondial de l’Unesco : quelle est votre position à ce sujet ? Quelles seraient les retombées de cette initiative pour le canton et le département ?
– Francis Fabin (Front national) : « Avant de classer des climats – ce dont se fichent les actionnaires de la Romanée Conti – il y a tout un aspect purement visuel des choses à arranger, pour faire plaisir aux touristes. »
– Eugène Krempp (EELV-Cap 21) : « Pour le canton de Gevrey-Chambertin et pour tout le territoire viticole, un classement de la côte viticole au patrimoine mondial de l’Unesco est tout bénéficie aussi bien pour l’attrait touristique, qui pourrait d’ailleurs être mieux adapté aux attentes des touristes du XXIème siècle, que pour l’optimisation du marché de nos vins. »
– Eric Michon (Front de gauche) : « Je ne suis pas certain que le classement de la côte viticole au patrimoine mondial de l’Unesco soit une priorité. Cela n’empêchera pas les vignobles de la Côte-d’Or d’être menacés par la concurrence exacerbée à laquelle se livre l’industrie viticole mondialisée, au détriment, encore une fois, des petits producteurs qui ne pourront pas lutter ».
– Hubert Poullot (Initaitives Côte-d’Or) : « Avec un canton viticole comme celui de Gevrey, je soutien d’une part l’activité viticole qui fait notre renommée et bien sûr la reconnaissance des climats de Bourgogne par l’Unesco. Cela sera une occasion de promouvoir la diversité de nos terroirs, de développer une économie touristique et de protéger ce patrimoine connu dans le monde entier. J’encouragerai le conseil général de la Côte-d’Or à soutenir cet objectif qui aura une retombée sur l’ensemble du département ».
– Jean-Claude Robert (Forces de progrès) : « Si, le conseil général s’est prononcé. Il finance même l’association qui porte le projet. Et pour notre part, nous avions regretté que la majorité UMP-NC désigne un conseiller municipal dijonnais d’opposition pour représenter le département au lieu de désigner un élu du terrain, en l’occurrence celui de Nuits-Saint-Georges ».
4 – La dette de la Côte-d’Or s’élevait en 2010 à 229,9 millions d’euros selon un dossier du magazine Capital (Lire ici l’article). Elle risque d’augmenter encore en 2011. Comme conseiller général, donneriez-vous la primeure à la multiplication des projets ou à la réduction des investissements pour assainir les finances du conseil général ?
– Francis Fabin (Front national) : « La dette : un peu moins de social. Si chaque famille était autonome financièrement, à commencer par les célibataires, ça ferait beaucoup d’argent pour des investissements permettant l’entretien de l’outil de production ou industriel ou artisanal ».
– Eugène Krempp (EELV-Cap 21) : « Il est évident que l’endettement du département est trop élevé ; certes l’Etat n’assume pas les compensations financières conformément à ses engagements mais le département s’est engagé dans des dépasses d’investissement que je qualifie de prestige par exemple : l’agrandissement de l’aéroport de Dijon-Longvic et le financement, sous forme de subventions annuelles, des déficits de fonctionnement déjà prévus, les dépenses de communication qui sont en très fortes hausses au détriment des différentes actions sociales en baisse. »
– Eric Michon (Front de gauche) : « La vérité est que sur ce point, l’Etat doit de l’argent aux Départements. Des espaces entiers de notre département se désertifient avec la fermeture des bureaux de poste, des classes scolaires. Les collectivités territoriales n’ont même plus les moyens de dégager complètement les routes en hiver alors que cette mission lui a été transférée sans contreparties financières. Les élus du Front de gauche mettront tout en œuvre pour récupérer ces moyens afin de doter prioritairement l’éducation, la santé, la préservation de l’environnement, la culture pour tous et de vraies mesures sociales ! ».
– Hubert Poullot (Initaitives Côte-d’Or) : « Aujourd’hui, dans une période difficile au niveau économique, il est indispensable d’engager une réforme sur les économies de cette énorme structure départementale. Je proposerai de former une commission spécifique sur la chasse aux dépenses superflues – information mensuelle ou frais de réception. Il faut également, dans le même temps, repousser des investissements qui ne sont pas urgents et investir sur des priorités telles que les structures d’accueil, la remise en état de certains secteurs routier… Il faut agir également avec les transferts de l’Etat, qui doit tenir ces engagements ».
– Jean-Claude Robert (Forces de progrès) : « Le département s’est effectivement beaucoup et beaucoup trop rapidement endetté. Fin 2011, l’endettement total sera de 346,8 millions d’euros (268 millions en 2010), soit une hausse de + 193 % depuis 2007. Au point de menacer aujourd’hui ses marges de manoeuvre. En cas d’alternance, nous lancerons un audit des finances pour vérifier l’intérêt départemental des engagements pris et des aides versées par le Département. Je ne peux pas prévoir ses conclusions aujourd’hui. Dans le même temps, nous engagerons les démarches appropriées, y compris judiciaires, pour obtenir de l’Etat des compensations financières plus justes pour obtenir le respect du principe constitutionnel de la libre-administration des collectivités locales. Il ne suffit pas de réduire des dépenses, il faut aussi chercher les recettes qui manquent ».
5 – Pouvez-vous évoquer un projet qui vous tient à cœur ?
– Francis Fabin (Front national) : « La Côte-d’Or s’honorerait de posséder une entreprise fabriquant des barrières pour bâtiments d’élevage, s’ouvrant en cas d’incendie. Les assurances agricoles (auxquelles participent les citadins) baisseraient. Les pompiers auraient moins de travail. Et les éleveurs/sélectionneurs pourraient dormir tranquille ; cela donnerait du travail pour le métallier ».
– Eugène Krempp (EELV-Cap 21) : « Dans le département (à l’exception de Dijon), les élus n’ont pas pris les dispositions pour mettre en place des aliments bio dans la restauration scolaire (primaire et secondaire). Il faut une volonté politique pour généraliser la distribution de produits bio, en commençant par le pain bio dès la rentrée 2011 et dès à présent, prendre les dispositions nécessaires pour organiser l’approvisionnement en légumes bio pour la rentrée scolaire 2012. A mon sens, la seconde priorité pour le conseil général serait d’inviter tous les acteurs à reconquérir la qualité des eaux superficielles et souterraines. »
– Eric Michon (Front de gauche) : « Comme il est dit plus haut, il faudra faire pression sur les directions des grands services publics (éducation nationale, la Poste…) pour leur redéploiement dans les zones rurales. Dans notre conception de la politique nous souhaitons associer la population locale à cette lutte. Un autre projet me tient à cœur : j’ai en tête d’associer les bibliothèques municipales existantes à un projet de bibliobus pour notre canton ».
– Hubert Poullot (Initaitives Côte-d’Or) : « Aujourd’hui, dans le cadre des compétences du conseil général, le projet qui me tient à cœur est la reconstruction du collège de notre canton ainsi que la mise en place des commerces de proximité pour les villages éloignés du chef-lieu de canton ».
– Jean-Claude Robert (Forces de progrès) : « La réfection du collège La Champagne à Brochon est à l’étude depuis plusieurs années. Le permis de construire est déposé. Il est temps de passer aux travaux pour un collège confortable, sécurisé et moderne. L’éducation est par ailleurs notre première priorité dans ces cantonales. La majorité a fait le choix de réduire de neuf à un million les crédits d’investissement pour les collèges du département en 2010. Tout un symbole… ».


