Dijon : « Le CHU ne peut pas être une entreprise marchande ! »

Alors que les malfaçons se multiplient sur le site du futur Bocage central à Dijon, les déconvenues se multiplient pour l’hôpital public. Vendredi 28 janvier 2011, la CGT a tiré la sonnette d’alarme suite à un conseil de surveillance extraordinaire, qui s’est tenu un peu plus tôt dans la journée. Selon les membres du syndicat, on veut « purement et simplement sabrer l’hôpital de l’intérieur »…

Le CHU voit rouge…

Depuis plusieurs semaines, la Centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon cumule les déboires financiers. Le 29 décembre 2010, le syndicat CGT 21 annonçait que la Caisse primaire d’assurance maladie de Côte-d’Or (CPAM) réclame au CHU de Dijon la somme de 3,7 millions d’euros au titre d’une sanction, suite à l’édition de 910.000 euros de factures « en trop » (Lire le communiqué ici). Quelques jours plus tard, l’Assurance maladie dément catégoriquement cette information et tient à faire le point en précisant que la CPAM a estimé le préjudice subi à hauteur de 1,68 millions d’euros, sans pour autant réclamer 3,7 millions d’euros de remboursement (Lire le communiqué ici). Ce chiffre n’est en fait qu’une estimation réalisée par l’Agence régionale de santé (ARS), calculant le montant potentiel que pouvait atteindre la sanction.

Puis la Confédération des praticiens des hôpitaux prend le CHU de Dijon comme exemple de la « machine à tuer » que représente la tarification à l’activité (T2A). Selon eux, « du fait de l’obligation du retour à l’équilibre en 2011, il n’y aura pas d’autre possibilité que la suppression, en nombre, de postes de médecins et de non médecins : c’est l’équivalent de 30.000 postes qui devront disparaître des établissements », ajoutant que « l’Objectifs nationaux des dépenses Assurance maladie (Ondam), enveloppe contraignante déterminée au niveau national par décision du gouvernement, impose à tous une chape de plomb qui ne permet même pas le financement des décisions de ce même gouvernement… ».

Bref, Dijon ne sera pas épargnée par cette conjoncture puisque selon la confédération, « c’est vingt postes d’infirmières que l’on va devoir supprimer et partout ailleurs, il faudra en moyenne supprimer 10% des effectifs ».

Une épée de Damoclès planerait au-dessus du CHU…

Si, du côté de la CGT, aucun chiffre n’est avancé, c’est que la situation est encore plus complexe. D’une part, comme l’explique Frédérique Mugnier, cadre de santé et syndicaliste, « la convergence tarifaire qui doit s’appliquer dans les Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) prévoit la diminution des budgets des établissements essentiellement publics ». En clair, le centre gériatrique Champmaillot de Dijon par exemple, verra son budget passer de cinq à six millions d’euros, soit l’équivalent de vingt-cinq à trente postes… De plus, la sanction du CHU, si elle n’est en aucun cas remise en cause par le syndicat, est jugée comme injuste : « la Caisse primaire d’assurance maladie donne chaque jour un million d’euros au CHU ! Il est normal que celle-ci ait un droit de contrôle », précise-t-elle.

Or cette amende se décompose en deux volets : un premier de 7,740 millions d’euros, ferme, payable en trente-six mensualités ; et un second de 1,1 millions d’euros. C’est cette dernière somme qui provoque la colère de la syndicaliste : « Cette somme ne nous sera pas facturée si nous faisons moins de 1% d’erreurs lors des prochains contrôles… Soit un barème en dessous du seuil de l’erreur humaine, qui est de 2 à 3% ! On sait donc d’emblée que ce n’est pas tenable ! ». Réunie en conseil de surveillance extraordinaire, la cadre de santé ironise en expliquant que « pour la première fois, j’ai appris que l’on pouvait obtenir l’unanimité » sur le fait que le CHU puisse engager « tous les recours gracieux ou contentieux contre la sanction ». Le tout en présence de Pierre Routhier, directeur de la CPAM de la Côte-d’Or.

« Une sensation d’abandon »

Car cette amende est un nouveau coup de massue sur l’hôpital, qui sort de deux plans de redressement budgétaire. Le premier, en 2006, avait engendré la suppression de soixante-cinq postes ; le second, en 2007, 135. Depuis, bien que le nombre de postes et de lits ait diminué, le spectre du plan de redressement refait son apparition, d’autant plus que l’engagement de l’Etat a été revu à la baisse, faisant de l’année 2010 un exercice non équilibré… Ainsi, alors qu’il devait finir 2010 en excédant de deux à trois millions d’euros, le CHU connait un déficit de plusieurs millions d’euros.

La faute, selon le syndicat, au non-respect des engagements de l’Etat sur les missions d’intérêt général (MIG) à hauteur de 29% des sommes. Pour résumer, le ministère, craignant un dépassement de l’Ondam, aurait gelé en octobre 2010 une partie du crédit, avant de le geler totalement en décembre pour l’ensemble des hôpitaux, même ceux respectant l’inflation des dépenses comme Dijon : il manque désormais 10 millions d’euros dans les caisses, dont 6,2 millions pour les seuls MIG, parmi lesquelles on trouve les missions de veille et de vigilance, les prises en charge des équipes pluridisciplinaires et des produits d’origines humaines, les aides d’urgences comme le SAMU ou le SMUR, les soins aux détenus… 2,6 millions sont aussi manquants pour financer le déménagement au Bocage central, lui aussi montré du doigt : parties entières de services non chauffées, portes non automatisées, absence de vitres de protection à l’accueil, etc. Certains praticiens avancent même le fait que l’hélicoptère ne pourra finalement pas se poser sur le toit en raison de la fragilité des vitres, et sera basé à la BA 102 de Longvic, dans le Grand Dijon… Affaire à suivre.

« Ne pas céder à l’affolement »

Le 26 janvier 2011, le député-maire de Saint-Apollinaire (21) a rencontré Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, pour « attirer son attention sur les décisions injustes qui contraignent budgétairement le CHU de Dijon alors que celui-ci a réduit considérablement son déficit en 2009 grâce à une forte progression de son activité, à des mesures sociales et à l’amélioration du codage, il se voit financièrement pénalisé en 2010 en raison d’une maitrise nationale des dépenses de santé qui ne prend en compte ni les spécificités régionales, ni celles du C.H.U. qui est en phase de restructuration autour d’un seul site »… Une délégation composée de ce dernier mais aussi de François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon, François Patriat, sénateur et président du conseil régional de Bourgogne, ou encore de François Sauvadet, député et président du Cconseil général de Côte-d’Or, devrait rencontrer Xavier Bertrand dans les prochains jours.

Une bonne chose pour Frédérique Mugnier, qui note cependant que « loin d’être à une contradiction près, deux ont voté le budget ! » Une lettre sera envoyée dès lundi 31 janvier 2011 pour présenter le plan de redressement, troisième du nom, qui sera mis en place. En découlera, pour la partie visible, le non remplacement de plusieurs départ à la retraite… « Il ne faut pas céder à l’affolement mais les contractuels sont sur la corde raide ». Accompagnée de Daniel Salaville, frigoriste à l’hôpital, et Luc Chapuis, aide-soignant, elle renouvelle son appel aux salariés, médecins, familles ou usagers pour faire front commun.

Car du côté des syndicats, l’union est loin de faire la force… Souhaitant convoquer une intersyndicale, Frédérique Mugnier s’est vu constituer une fin de non-recevoir : FO a tout simplement quitté la réunion, la CGC est arrivée avec une heure de retard tandis que la CFDT a déclaré que « ce n’était sans doute pas la meilleure période »… « C’est une gestion cynique des soins », conclut la syndicaliste, qui s’appuie sur le discours des vœux de Nicolas Sarkozy aux personnels de santé en 2010 (Voir ici sur France2.fr).

Une réflexion sur “Dijon : « Le CHU ne peut pas être une entreprise marchande ! »

  1. Ainsi participer a lessor de lagglomeration dijonnaise est un enjeu pour le dynamisme de toute la Bourgogne . Ces mots prononces par le prefet de region Christian de Lavernee lors de la signature du contrat expliquent la raison pour laquelle Region et Etat sinvestissent economiquement pour le developpement de la metropole dijonnaise…Cette collaboration qui court jusqua lhorizon 2013 a deux objectifs.

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