Archive | 18 janvier 2011
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LA PHOTO DU JOUR
Dijon : La presse sous pressions
Une ombre menaçante plane sur la liberté de la presse à Dijon ! Les cas de journalistes victimes de menaces et d’intimidations sortent aujourd’hui du domaine de l’exception pour s’inviter sur le terrain des habitudes anti-démocratiques… Une situation dont Reporters sans frontières se fait l’écho dans un communiqué* daté du lundi 17 janvier 2011, qui s’alarme d’une « série d’actes inacceptables survenus au cours des derniers mois à Dijon ». Jérémie Demay, journaliste pour La Gazette de Côte-d’Or et les Dossiers du Canard Enchaîné, témoigne pour dijOnscOpe des pressions dont il est aujourd’hui l’objet…
Tentative de manipulation contre La Gazette de Côte-d’Or
« Je n’évoquerai que les faits pour lesquels les preuves sont irréfutables », précise d’emblée Jérémie Demay, collaborateur de La Gazette de Côte-d’Or et des Dossiers du Canard Enchaîné. Pour ce journaliste dijonnais, le quotidien a pris un triste tournant depuis la parution d’un article du journal en ligne Rue89.com, dévoilant les dessous du fonctionnement de la chaîne de télévision locale Voo Tv (Lire ici l’article de Rue89, là le nôtre)…
L’enquête, signée d’Augustin Scalbert et Jacques Thomas, s’interroge notamment sur les nominations du président et du directeur général de la chaîne par le sénateur-maire PS de la ville, François Rebsamen, ainsi que sur les intérêts économiques et politiques que partageraient les trois hommes. « Comme je préparais une enquête sur le même sujet pour les Dossiers du Canard Enchaîné, Patrice Tapie, président de la CGPME et président de Voo Tv, tout comme Jean-Louis Pierre, directeur général de la chaîne, ont conclu que j’étais en réalité le second signataire de l’article, ce qui est totalement faux ! », raconte Jérémie Demay.
Si l’affaire s’en était tenue là, elle aurait relevé de la mésentente et n’aurait pas franchi la frontière du raisonnable. Pourtant, quelques jours après la parution de l’article, les deux principaux intéressés « ont interpellé publiquement Thomas Barbier, directeur de la Gazette de Côte-d’Or, pour lui demander de me licencier », témoigne-t-il. Et d’ajouter : « On ne voit pas ça en France, normalement ! Heureusement, Thomas Barbier leur a demandé de rester polis et a opposé une fin de non-recevoir à leur demande ».
« Éradiquer le journalisme de caniveau »
Comme le fait remarquer le communiqué de Reporters sans frontières (RSF), daté du lundi 17 janvier 2011, le « climat délétère » qui règne dans la capitale des ducs de Bourgogne a connu un nouvel épisode lors de la cérémonie des vœux de la CGPME, lundi 10 janvier 2011 à la mairie de Dijon (Lire ici notre article)…
« Dans une série de vœux enregistrés en vidéo apparaît Jean-Louis Pierre, directeur de la chaîne de télévision locale Voo Tv. Celui-ci a été nommé à ce poste en juillet dernier par François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon (PS). Dans la vidéo, Jean-Louis Pierre tient des propos pour le moins étonnants : « Un vœu que j’adresse à François Rebsamen : j’aimerais qu’il fasse passer plus souvent la balayeuse municipale pour éradiquer, une fois pour toutes, le journalisme de caniveau », rapporte l’organisation qui milite pour la liberté de la presse (Voir ici la vidéo).
Menaces contre le groupe Forum Eco
Et de rappeler que des faits similaires étaient survenus lors de la même cérémonie des vœux, en janvier 2009… « Patrice Tapie, président de la CGPME et actuel président de la chaîne Voo Tv, avait demandé aux dirigeants du groupe Forum Eco, groupe propriétaire du Journal du Palais à Dijon, de « faire le ménage dans leur journal », ciblant ouvertement le rédacteur en chef de l’hebdomadaire (ndlr : Patrice Bouillot) dont il avait également demandé la mise à pied », ajoute le communiqué.
Au regard de ces événements, RSF demande ainsi « aux élus, garants des bonnes pratiques démocratiques, de veiller à empêcher toute forme de censure et de pression sur les professionnels des médias locaux ». « En tant que premier magistrat de la ville, François Rebsamen doit au plus vite mettre fin publiquement à de tels procédés », conclut le document.
*Pour en savoir plus, lire le communiqué de presse ci-dessous.
« Reporters sans frontières – Communiqué de presse – 17/01/2011
A Dijon, la liberté de la presse n’est pas du goût de tout le monde
A Dijon, de nombreux journalistes et collaborateurs des médias s’inquiètent du climat délétère et de la multiplication des pressions dont ils font l’objet.
Dernier fait en date : le 10 janvier 2011, la mairie de Dijon accueillait la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME). Dans une série de vœux enregistrés en vidéo apparait Jean-Louis Pierre, directeur de la chaine de télévision locale VOO TV. Celui-ci a été nommé à ce poste en juillet dernier par François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon (PS). Dans la vidéo, Jean-Louis Pierre tient des propos pour le moins étonnants : « Un vœu que j’adresse à François Rebsamen. J’aimerais qu’il fasse passer plus souvent la balayeuse municipale pour éradiquer, une fois pour toutes, le journalisme de caniveau ».
Ce n’est pas la première fois que cette cérémonie des vœux est le théâtre de tels propos. En janvier 2009, Patrice Tapie, président de la CGPME et actuel Président de la chaîne VOO TV, avait demandé aux dirigeants du groupe FORUM ECO, groupe propriétaire du Journal du Palais (journal économique bourguignon) de « faire le ménage dans leur journal », ciblant ouvertement le rédacteur en chef de l’hebdomadaire dont il avait également demandé la mise à pied.
Plusieurs journalistes de la ville s’inquiètent également de voir Jean-Louis Pierre animer prochainement une émission politique sur l’antenne de VOO TV alors qu’il a été nommé par le pouvoir en place et que les élections cantonales se tiendront dans quelques semaines.
Ces propos s’inscrivent dans une série d’actes inacceptables survenus au cours des derniers mois à Dijon : pressions sur les patrons de presse afin qu’ils licencient leurs reporters trop curieux, intimidations de journalistes, menaces de suppression de budgets publicitaires, etc.
Reporters sans frontières demande en conséquence aux élus, garants des bonnes pratiques démocratiques, de veiller à empêcher toute forme de censure et de pression sur les professionnels des médias locaux. En tant que premier magistrat de la ville, François Rebsamen, doit au plus vite mettre fin publiquement à de tels procédés. »
Voitures incendiées à Chenôve (21) : Une ville sous le choc…
Après l’incendie de deux véhicules à Chenôve (21) dans la nuit du jeudi 13 janvier 2011*, pas moins de dix autres – pour cinq départs de feu différents – ont été dénombrés tout au long de la nuit du vendredi 14 jusqu’au samedi 15 janvier vers 7h30 du matin… puis à nouveau cinq autres sur un seul et même lieu, dimanche 16 janvier, vers 6h35. Au total, une vingtaine de voitures ont totalement été détruites ou partiellement endommagées ces derniers jours dans la commune du Grand Dijon. « Il y a des mois que nous étions tranquilles… Cela fait un mal fou aux gens qui le découvrent en double-pages dans le journal. Et cela nous fait de la peine, cela me fait de la peine », a exprimé Jean Esmonin, maire de Chenôve, lors de la conférence de presse organisée lundi 17 janvier 2011 (Lire ci-dessous sa déclaration en entier).
Ce dernier a souhaité réunir rapidement les médias afin d’exprimer sa « colère » : « De tels actes ne doivent pas rester impunis ! On ne peut pas transiger avec ceux qui, par leur comportement, tentent de s’accaparer des territoires et installent un climat d’insécurité, de peur, au mépris des lois et des fondements-mêmes de notre République qui, plus que jamais aujourd’hui, sont gravement menacés sur nos quartiers et sur nos villes ». Et de demander le retour de la police de proximité : « J’en appelle à l’Etat afin qu’il assume pleinement ses responsabilités », (…) « la vidéoprotection ne suffit pas », (…) « nous avions demandé une Unité territoriale de quartier (Uteq) mais nous n’en avons pas eue (…) ; nous avons un commissariat où il n’y a presque plus personne ».
Si le maire a lancé un appel à témoigner aux concitoyens « qui auraient aperçu quelques mouvements ou individus », en précisant qu’il ne s’agissait pas de « délation », lundi 17 janvier, trois jeunes hommes avaient d’ores et déjà été interpellés dans cette affaire et étaient toujours en garde à vue à l’hôtel de police de Dijon. Des appels anonymes auraient permis ces arrestations… « Ce sont des gens très connus des services de police », a précisé le maire.
Quant à l’indemnisation des victimes, Jean Esmonin affirme avoir « espéré que la loi du 1er juillet 2008 ** constituerait une avancée significative. Aujourd’hui, plus de deux ans après son entrée en vigueur le 1er octobre 2008, force est de constater que de nombreuses interrogations demeurent bien présentes quant à l’application réelle de cette disposition législative… Et je ne peux manquer de m’interroger régulièrement sur l’efficacité et la rapidité d’intervention de ce « fonds de garantie », via la Commission d’indemnisation mise en place auprès du tribunal de grande instance ».
L’une des victimes était justement présente à la conférence de presse. Au sujet de l’indemnisation, celle-ci prend alors la parole : « Je vous remercie monsieur le maire pour les trois cents euros que vous m’avez donné. Je crois bien que vous êtes la seule mairie en France à le faire. Je sais que je ne peux pas compter être remboursée par les responsables : ils ne sont pas solvables. Trois cents euros, bien sûr que cela aide, mais cela ne sera pas assez. Je venais d’acheter cette voiture 1.600 euros. J’ai dû économiser des mois pour pouvoir me la payer – je travaille à l’usine et j’élève seule mon enfant. Et je ne vais être remboursée de rien du tout : je n’étais pas assurée contre les incendies. Et vous savez pourquoi ? Parce que mon ancienne voiture avait déjà été incendiée l’été dernier (ndlr : 2010) et que mon assureur n’a pas souhaité me réassurer sur l’incendie de véhicules ».
* Ces deux véhicules avait été préalablement volés sur Dijon.
** Cette loi a créé de nouveaux droits pour les victimes et vise à étendre aux propriétaires de véhicules incendiés le principe de réparation inscrit dans le Code de procédure pénale.






